Le present ouvrage, publie par la Faculte de Dıoit de l’Universite d’Istanbul, rassemble quelques cours inedits d’Emile Durkheim. Les lecteurs se demanderont sans doute comment cette Faculte a pu avoir le privilege de parter â la connaissance du monde scientifique cette oeuvre inedite du grand sociologue français. C’est lâ tine curiosite bien comprehensible. Je me pro-pose ici de la satisfaire en quelques mots : J’avais, en 1934, entrepris â Paris, la preparation d’une these de doctorat en droit sur “L’idee de l’Etat chez les pre-curseurs de l’Ecole sociologique française”. II m’avait alors parti indispensable de connaître tout d’abord la pensee exacte d’Emile Durkheim, fondateur de cette ecole, sur le probleme de l’Etat. Ce sociologue n’ayant pas fa.it de ce probleme fob jet d’une etüde speciale et s’etant contente, dans ses oeuures dejâ parues,d’evoquer certaines questions s’y rapportant, je tas amene â penser qu’il şerait, peut-etre, possible de trouver des explications appropriees et detaillees dans ses inedits, s’il en existait. Dans l’espoir d’y parvenir, je m'adressai au celebre ethnographe Marcel Mauss, neüeu d’Emile Durkheim. M’a-yant reçu de la maniere la plus cordiale et exprime sa grande sympathie pour la Turquie qu’il avait uisitee en 1908, celui-ci me montra un certain nombre de manuscrits intitules “Phy-sique des Moeurs et du Droit”. “C'etait, dit-il, les cours pro-fesses par Emile Durkheim entre les annees 1890-1900 â Bor-deaux et repetes en Sorbonne, d’abord en 1904- puis en 1912 et repris en conlerences quelques annees avant sa mort”. Marcel Mauss, qui n’hesita pas â me les confier, ce dont je me souviens avec plaisir, me remit, sur ma demande, une copie dactylographiee d’une partie des manuscrits suscep-tibles de m’interesser particulierement. Je tiens â rcndre hom-mage, â cette occasion, â la memoire du regrettc savan t qui m'apporfa ainsi un concours inestimable. Marcel Mauss m’avait fait part, lors de nötre entretien, de son intention de publier ces manuscrits, dans “Les An-nales sociologiques” dont il etait membre du Comite de re-daction. Mais il n’en a publie, en 1937, dans la Revue de Metaphysique et de Morale, que la premiere partie compre-nant trois leçons sur la Morale professionnelle. 11 l’a fait, ecrit-il dans sa note introductive, pour se conformer aux ins-tructions redigees, peu de mois avant sa mort, en 1917, par Emile Durkheim qui destinait quelques-uns de ses manuscrits, en signe de son amitie, avant tout autre d Xavier Leon, londateur de la Revue de Metaphysique et de Morale. Mar-cel Mauss y annonçait qu’il publierait plus tard, avec ces trois leçons, les leçons de Morale civique qui les suivaient En 1947, j’ai publie dans la ‘‘Revue de la Faculte de Droit d’lstanbul” une traduction turque de six leçons de Morale civique dont je disposais. Mais, bien que je ne l’aie ren-contree nulle part, j’avais voulu savoir auparavant avec certitude si la publication projetee par Marcel Mauss avait eu lieu. Je lui ecrivis done le priant de m’en informer. Comme je n’a-vais pas de reponse, je fis appel, grâce d FInformation obte-nue par M. C. Bergeaud, Conseiller culturel pres l'Ambassade de France en Turquie, d Madame Jacques Halphen, fille d’E-mile Durkheim. Madame Jacques Halphen eut l’obligeance de me faire savoir que Marcel Mauss, tres eprouve par les souffrances qu*il subit personnellement pendant I’occupation, n etait pas en etat de pouvoir donner le moindre renseignement. Elle m’apprit par la süite que les manuscrits en ques-tion qu’elle avait pu identifier d l’aide de la copie que je lui avais envoyee, se trouvaient au Musee de l’Homme avec tous les ouvrages et documents constituant la Bibliotheque de Marcel Mauss. Ces manuscrits comprenaient, precisaitelle, outre les trois leçons de Morale profesionnelle dejd publiees, quinze leçons de Morale civique qui n’ont pas encore ete publiees en France. Quelques mois plus tard, j’envisageai la possibilite d’assurer la publication de l’ensemble de ces leçons par les soins de la Faculte de Droit d’lstanbul. Madame Jacques Halphen, consultee, voulut bien donner son accord â ce projet, que la Faculte de Droit approuva volontiers. |